L’Espagne et l’Amérique latine rassemblées grâce aux livres

Durant la dictature franquiste en Espagne, la Direction Générale des Relations Culturelles du Ministère des Affaires étrangères à Paris organisa, le 20 octobre 1952, l’Exposition du Livre Espagnol Contemporain. Cet événement fut l’occasion de créer ensuite dans la capitale française un lieu dédié à la diffusion de la culture et la littérature espagnoles : la Bibliothèque espagnole. Avec la création de cet espace, les livres exposés lors de l’événement furent conservés à la bibliothèque. Quelques 3.600 documents publiés à partir de 1940 furent choisis, dans le but d’offrir un panorama de la production éditoriale espagnole de l’époque.

L’emplacement élu pour la bibliothèque fut un bel hôtel particulier au n° 11 de l’Avenue Marceau¹. Auparavant, le bâtiment fut le siège du gouvernement basque en exil, pendant la Guerre Civile et les années qui s’ensuivirent, mais également un local de la police espagnole pendant les années noires.

Pour Consuelo Alvarez, ancienne directrice de la bibliothèque* et qui a travaillé au sein de différentes bibliothèques de l’Institut Cervantes à Rome, à Londres, à Lyon, à Naples et à Paris, après la Guerre d’Espagne, puis la Deuxième Guerre Mondiale, l’Europe fut complètement détruite tout comme les liens d’amitié entre les pays : « La création de la bibliothèque à Paris a permis d’avoir un espace pour la culture espagnole et de cette manière rétablir les relations avec les pays voisins. » Avec cette nouvelle institution, l’Espagne montra un visage séduisant.

Mais à quoi cela sert de construire une bibliothèque dans un autre pays en période de crise et de guerre ? La culture, comme la politique ou l’économie, est fondamentale dans le développement de l’identité d’un pays. Cependant, on pourrait penser que la littérature et tous autres arts ne servent pas à améliorer la situation d’un pays dirigé par un régime autoritaire et dictatorial. C’est faux.

Paris fut un lieu clé pour beaucoup d’écrivains, d’historiens, de peintres, de sculpteurs, d’architectes, de cinéastes, de compositeurs et de danseurs espagnols. Cette recherche d’inspiration, mais aussi de liberté, permit à de grands auteurs et artistes d’être connus en France et dans le monde.

L’aspect le plus important dans cette histoire fut donc la création de la Bibliothèque Espagnole à Paris pendant la dictature franquiste. Le deuxième point essentiel réside dans l’idée que la culture et la littérature espagnoles s’enrichissent grâce au contact et au partage avec le patrimoine de l’Amérique latine. À ce sujet, Consuelo Alvarez pense que « la culture espagnole serait moins importante si elle ne faisait pas partie de tout ce patrimoine qui vient de l’Amérique latine. Ce qui unit ces deux cultures est évidemment la langue et aussi le fait d’avoir des structures politiques similaires. »

La présence de la littérature hispanique à Paris s’est répandue dans la deuxième moitié du XXe siècle grâce à l’expansion de la collection de livres de la bibliothèque, à l’organisation d’événements autour de la littérature hispanique et, à partir de 1991, à son intégration dans le réseau de bibliothèques de l’Institut Cervantes, qui venait d’être créé.

En 2005, la Bibliothèque Espagnole changea son nom pour s’appeler Bibliothèque Octavio Paz, en hommage à l’écrivain mexicain à qui a été décerné le Prix Cervantes en 1981 et le Prix Nobel en 1990.

1. Le bâtiment qui abrite la Bibliothèque Octavio Paz au 11 avenue Marceau, 75116 est fermé temporairement au public pour des travaux de rénovation. La Bibliothèque continue à accueillir le public au siège de l’Institut Cervantes, situé au 7 rue Quentin Bauchart, 75008 Paris.
* Consuelo Alvarez a été la directrice de la bibliothèque Octavio Paz de septembre 2012 à août 2015. Depuis septembre 2015, la directrice est Francisca Segura.